First day at work | Eltanin & Eleanora

T’avais l’impression d’être en meilleure forme ces derniers temps. De meilleure humeur en tout cas, ça ne ratait absolument pas, et tu savais très bien d’où ça venait. Tomos jouait pour une énorme partie, sans parler de tout simplement le bonheur qu’il pouvait t’apporter. Puis dernièrement, t’avais repris ce bâtiment. Cet ancien commerce de livre qui puait la mort, et t’avais fait de ton mieux pour en faire une apothicairerie. L’ancienne avait fait faillite tu ne savais pas trop pourquoi, mais ça t’arrangeait. Énormément. Bien que faire de la concurrence ne t’aurait absolument pas dérangé, t’aurais peut-être eu du mal à gérer le tout. Parce que c’était bien de faire le malin là à vouloir tout faire tout seul, être certain que t’y arriverais, et vouloir y arriver.

Déjà pour tout redécorer, t’avais eu un peu de mal à bien arranger ça. Si c’était aussi beau, t’étais certain que c’était grâce à ton fiancé qui avait bien voulu t’aider. A deux ça avait été nettement plus vite et ses conseils avaient été assez précieux. Même énormément. Tu faisais de ton mieux pour que tout reste en ordre, bien qu’avec la magie, ce n’était pas le plus gros problème. Non, le plus gros, c’était le nombre de clients. Qui était beaucoup plus important que ce que tu n’aurais pensé. Ah bah oui. T’étais sur le Chemin de Traverse, pas une petite ruelle ridicule sur le côté. Ca aurait pu aller, si tu commandais tes potions en soi à quelqu’un d’autre. Mais t’en avais pas envie, tu te refusais de le faire, t’avais ta dignité et tu tenais à ce que ce soit de la qualité. Et pour ça, tu ne faisais que confiance à toi-même ; et quand tu revenais le soir, t’avais pas du tout envie de te replonger là-dedans. Surtout pas quand tu voyais que Tomos était là. Vous aviez nettement mieux à faire, oui. Depuis que t’avais des horaires fixes, autant en profiter le plus possible, en fait. T’avais toujours réussi à tirer le bon de ce que tu pouvais vivre, alors pourquoi ça ne continuerait pas.

Mais joindre tous les bouts là, ça commençait vraiment à être difficile. Même plus que ça. T’étais heureux, mais qu’est-ce que t’étais crevé, en fait. Et encore c’était un euphémisme à ce point là. Tu l’étais presque autant que lorsque t’enchaînais les gardes, sauf qu’ici, t’étais heureux en rentrant, et t’étais heureux d’y aller. Mais t’avais pas envie que ça ne pâtisse sur ton physique non plus. Ce serait une très mauvaise idée. Donc t’avais bien dû te rendre à l’évidence, et surtout mettre tout ce que tu pouvais avoir de côté pour demander de l’aide. Pour permettre à un employé de venir t’aider. T’aimais pas trop l’idée, mais bon. T’avais pas trop le choix et en plus, tu pourrais quand même faire attention à qui t’allais embaucher. Sans doute que t’étais un peu trop dur envers eux, mais bon. Tu ne voulais pas n’importe qui.

Tu ne voulais pas que ce soit une bête apothicairerie, tant qu’à faire, tu voulais que les gens puissent aussi venir se tourner vers ici lorsqu’ils étaient malades, autant mettre à bon escient tes connaissances en médecine. Puis si ça pouvait faire de la clientèle en moins à Sainte-Manguste hein. Mais chercher une personne avec des compétences en médecine en plus des potions et du commerce, ce n’était pas chose aisée. Du tout. T’étais prêt à abandonner, jusqu’à ce que tu ne croises le cv d’une jeune femme qui avait attiré ton attention. Certes, elle ne remplissait pas absolument tout. Mais au point où t’en étais. C’était celle qui avait de loin la candidature la plus intéressante.  Alors tu lui avais proposé un entretien, chose parfaitement normale.

Et elle ne devrait pas tarder d’ailleurs. Tu lui avais donné rendez-vous avant l’heure d’ouverture, ce serait plus simple. Vous seriez plus tranquille. Et t’étais en train de te prendre un café lorsqu’elle était arrivée, plus tôt que prévu. Pas vraiment quelque chose de néfaste. Tu t’étais avancé en lui tendant la main, ce serait plus poli.


« ▬ Bonjour ! Enchanté, vous pouvez m’appeler Eltanin. On pourra aller dans l’arrière-boutique, s’y installer, ce sera plus agréable pour discuter ! Non ne vous en faites pas, il vaut mieux ça que l’inverse ! Vous voulez quelque chose à boire ? »


Autant qu’elle soit le plus à l’aise possible. Tu n’avais jamais fait ce genre de choses, mais tu te doutais qu’elle devait être un minimum stressée. En attendant, tu allais lui ouvrir la porte et la lui tenir. Autant être poli par la même occasion.

T’aurais bien aimé rester encore un peu plus près de Tomos ce matin, comme à chaque fois. Mais tu savais aussi que vous alliez vous envoyer des lettres, que tu le reverrais ce soir aussi. T’attendais que ça. De pouvoir être avec lui, même si tu savais que ta journée serait sans doute bonne. Mieux qu’à l’hôpital en tout cas. Qu’elle serait différente aussi, déjà rien qu’avec la venue de cette jeune femme. Peut-être que ça mènerait absolument à rien. Du tout. Mais vous n’aviez rien à perdre, que ce soit toi ou elle. Bon, surtout toi, elle peut-être que sa vie jouait sur ce poste, mais tant pis, t’étais pas là pour commencer à avoir pitié des gens. Tu ne serais pas sorti de l’auberge. Mais t’allais bien voir ce qui allait se passer. Autant partir optimiste, parce que bon, ça ne servait à rien de tirer la gueule et sans doute la stresser encore plus. Certes, il fallait quand même savoir avoir une certain résistance dans ce travail, surtout lorsque c’était l’heure de pointe.

Enfin. T’avais eu une bonne première impression. Elle avait l’air d’être assez énergique et de bonne humeur. Après, c’était peut-être un peu normal, elle se forçait peut-être pour aujourd’hui, mais au moins ça donnait une bonne impression. Puis rien que le fait de ne pas être seul, de pouvoir parler à quelqu’un qui aurait les mêmes horaires, c’était assez chouette. Quelqu’un qui avec un peu de chance avait les mêmes passions que les tiennes.Tu n’allais pas non plus passer ta journée à la distraire hein, mais au moins ça te changerait de juste les clients.Qui n’étaient pas toujours passionnants.


« ▬ Ca fait plaisir en tout cas de voir quelqu’un de motivé !  Je vous amène ça tout de suite ! Et n’hésitez pas à poser vos affaires si vous le souhaitez, ce n’est pas comme si on manquait de place ! »


T’avais sorti ta baguette pour pouvoir faire venir un verre d’eau et le poser près d’elle, avant d’aller t’asseoir en buvant encore un peu de ton café, autant éviter qu’il ne refroidisse. Et qu’il ne devienne parfaitement dégueulasse, même si tu pourrais le réchauffer. T’avais un peu souri en l’entendant reprendre la parole.


« ▬ Merci ! Je trouve aussi que c’était dommage de rester sans apothicairerie, ce n’est pas utile à tout le monde, mais on a tendance à oublier à quel point ça peut être nécessaire. Oui, parfaite même pour un commerce ! Je ne vous le fait pas dire, je ne pensais même pas que ça aurait pu avoir autant de succès ! D’ailleurs si jamais ça se passe bien, vous êtes libre aujourd’hui ? Ce serait assez incroyable si vous pouviez d’ores et déjà travailler ! Mais je vous expliquerai tout en détail, je pourrai même être un peu derrière vous le temps que vous preniez vos marques. Enfin. J’ai vu que vous aviez fait des études en médecine, avant d’aller dans le commerce, ça ne vous tentait pas plus que ça, ou alors vous étiez juste nettement plus motivée par le commerce ? »

T’étais sans doute pas fait pour ça, pour commencer à faire passer des tonnes d’entretiens. Déjà que tu n’avais aucune idée de comment t’allais faire pour choisir la personne. Bon t’en aurais pas des tonnes, étant donné que tu faisais déjà un énorme tri au niveau des cv que tu recevais. Parce que ça ne servirait à rien de perdre du temps avec des personnes que tu n’accepterais de toute manière pas. Il était hors de question que tu prennes n’importe qui. Déjà que t’avais du mal à ne pas trier les gens qui pourraient mettre les pieds ici. Ah bah si déjà on pouvait demander le rang là des gens, ça pourrait être pas mal. Raciste, certes, mais qu’est-ce que t’en avais à faire. Absolument rien. Tu voulais que ça reste un bel endroit fréquentable donc bon. Il fallait faire des sacrifices. Et celui là n’était pas très difficile. Ni horrible à faire. D’ailleurs si ça se trouvait tu faisais face à une née-moldue et ça ce serait extrêmement dommage. Parce qu’elle avait l’air vraiment bien. Et tu ne pouvais pas vraiment lui demander. Ni même le demander à qui que ce soit, ça ferait certainement de la mauvaise publicité pour le magasin qui n’était vraiment pas si vieux que ça. Tout ça pour de l’ego mal placé, ce serait quand même vraiment con.


« ▬ J’ai l’impression que ça se perd de plus en plus, c’est assez dommage ! Je ne vais pas vous cacher que c’est un bon point, il est assez important d’arriver à en avoir même avec les pires clients du monde. Avec plaisir ! »


T’allais peut-être t’installer aussi hein ça pouvait être pas mal. Ca pouvait être eplus confortable et moins gênant parce qu’elle risquait de croire que t’essayes de la prendre de haut. Ce qui n’était pas vraiment le cas. Même pas du tout, au fond. Pas pour le moment. T’avais fait venir un verre d’eau à toi par la même occasion, parce que ce serait un peu plus convivial. Et comme ça, ça faisait un peu moins con quand tu l’écoutais, tu pouvais occuper un minimum tes mains.


« ▬ Parfait ! Je vous avoue que je n’aurais pas pensé que ça puisse avoir autant de succès rapidement, et il est de plus en plus difficile de jongler entre la confection des potions, le renseignement des clients et la vente. Je comprends totalement, surtout si vous aimez le contact. Pas que vous risquiez d’en manquer en médecine, mais…Il aurait été bien différent ! Oui, ce n’est pas non plus comme si vous vous embarquiez directement dans quelque chose qui vous collera à vie non plus. C’est compréhensible ! Et très utile aussi, bon nombre de clients à la fierté un peu trop grande préfère se tourner vers ici et demander conseil que d’aller directement à l’hôpital. Vous avez fait un stage lors de vos années de médecine ? Vous aviez un domaine de prédilection ? »


Bon, ce n’était pas très important si elle ne s’était pas tournée vers les potions, mais c’était toujours bon à savoir, parce que dans tous les cas, ça pourrait vous rapporter quelque chose.

Ce qui était bien là tout de suite, c’était qu’elle n’avait pas l’air trop stressée non plus. Et ça changeait de ceux que t’avais pu voir. Parce que bon, même si tu comprenais totalement le fait de l’être, c’était parfois un peu chiant, et c’était surtout malaisant. Alors qu’ici c’était totalement naturel. Du moins t’avais l’impression, peut-être qu’elle stressait énormément au fond d’elle et qu’elle ne montrait pas grand-chose. Mais en tout cas, elle était douée si c’était le cas. Et c’était un point positif. Mais elle avait l’air vraiment pas mal. Du tout. Peut-être la meilleure que t’avais trouvée jusqu’à maintenant.  Peut-être la meilleure que tu trouverais. En tout cas c’était bien parti pour.Déjà parce que t’avais l’impression que le courant passait bien entre vous. Naturellement.


« ▬ Il faut aussi pas mal de patience avec certains, je ne vais pas le cacher. Enfin, peut-être que vous avez déjà eu quelques expériences dans le commerce auparavant, mais j’imagine que comme partout les gens pensent primer sur tout le monde, il faut réussir à réagir assez rapidement et de préférence avoir une bonne mémoire. »


Il valait mieux oui, pour pouvoir se rappeler d’où se rangeait telle fiole et tout ce qui allait avec. T’avais eu de la chance d’avoir quand même une mémoire photographique. Ca t’avait pas mal aidé à plusieurs reprises, et ça continuait d’ailleurs. Enfin, tu t’étais un peu mieux installé sur ta chaise en souriant.


« ▬ C’est sûr et certain ! Totalement ! Enfin, j’ai fait des études de Maître des Potions, mais j’ai directement travaillé en médecine après ça pendant une dizaine d’années. Vous allez peut-être y prendre goût et finir par faire ça toute votre vie ! C’est sûr, surtout quand la douleur est bégnine, on perd moins de temps à venir ici. Mmh, c’est parfait tout ça. Si ça se trouve, on s’est déjà croisés lorsque vous y étiez ! Enfin, vous habitez loin d’ici, ou vous avez votre permis de transplanage ? Même si ce sont des horaires normaux, il m’est déjà arrivé de fermer un peu plus tard à plusieurs reprises, bien que ça n’arrivera peut-être plus ou moins si on est deux, c’est assez difficile de chasser les clients. »

Peut-être que t’étais en train de faire une grosse connerie. Parce que t’avais jamais vraiment été le genre de personne à travailler en groupe, encore moins en binôme. Déjà en cours c’était pas fameux, tu t’arrangeais au choix pour être avec Misam, qui savait très bien te laisser faire entièrement l’exercice en question seul lorsqu’il s’agissait d’un cours que t’appréciais ou dans lequel t’étais plus calé qu’elle et inversement. Et ça avait toujours bien fonctionné comme ça. T’avais bien conscience qu’on ne pouvait pas toujours s’en tirer seul dans la vie qu’il fallait bien de temps en temps essayer de faire des concessions, mais c’était pas du tout ton truc. Enfin. Ici c’était encore un peu différent elle pourrait totalement s’occuper du magasin lorsque toi tu pouvais être dans l’arrière-boutique à préparer tu ne savais quelle commande et ça c’était l’avantage. Vous n’alliez pas non plus être collés et aucun ne traînerait dans les pieds de l’autre, normalement.


« ▬ Parfait, au moins vous avez déjà pu avoir un avant-goût, vous l’avez fait combien de temps ce travail d’étudiant ? Vous m’avez en plus l’air d’être une personne assez avenante, ce qui n’est pas plus mal non plus de nos jours. Même si certains clients préfèrent être tranquilles, d’autres n’attendent uniquement que l’on vienne vers eux pour les aider, je suis sûr qu’après un certain temps on peut les reconnaître assez facilement. »


Certains gestes ne trompaient pas. Même si t’étais pas encore devenu un professionnel en la matière, tu ne perdais pas totalement espoir. Puis bon, au niveau pire, on te remballerait si t’allais les voir directement, et pour le moment ils n’avaient pas encore trop usés de ta patience, heureusement . Parce que si c’était le cas après quelques jours, t’allais pas tenir forcément longtemps. Et le but n’était pas de faire faillite encore rapidement que l’ancien magasin, en fait.


« ▬ Assez oui je trouve ! Oui, un peu trop même, si le temps pouvait passer moins rapidement, ça m’arrangerait pas mal. Je comprends totalement, puis rien que l’ambiance est beaucoup plus calme et ça peut faire moins peur aussi. D’accord ! Ce sera nettement plus simple pour vous au niveau des horaires, même si c’est assez basique. J’ouvre à 9h30, mais je préfère venir une demi-heure avant pour pouvoir finir de ranger les réapprovisionnement, ou même entamer quelques commandes s’il y en a déjà. Vous êtes totalement à l’aise avec le transplanage ? Jusqu’à maintenant je me suis contenté de les envoyer par hibou, parce que je peux difficilement laisser le magasin totalement seul, mais ce n’est pas vraiment l’idéal, il est déjà arrivé à quelques reprises que des flacons se brisent ou autre. Ce serait sans doute plus simple si on pouvait directement aller chez le commanditaire. »